Combat du peuple Karen

       
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COMMANDANT GUILLAUME

 

Homélie prononcée à la chapelle royale du Val-de-Grâce, le 6 décembre 2002

 

 

Le Commandant et BA THIN

 

 

L’Adieu au Commandant Guillaume

 

« Faute de faire silence et de prêter l’oreille, nous risquons de ne pas entendre le choeur des constellations qui raconte la gloire de Dieu » (Psaume 18).

 

Nous risquons de ne pas entendre le pilote, Pastor et Nauta, le Pasteur et le Pilote.

 

Il est des heures où il faut savoir s’arrêter et faire le point. Le marin regarde souvent vers les étoiles car la voûte du ciel étoilé introduit la méditation.

 

« Regarde l’Etoile, regarde vers Marie » s’écrie saint Bernard.

 

Ave Maris Stella !

 

Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus voyait son âme comme une barque qui avance sur un sillon de lumière et ce sillon, couleur sang et or, plonge dans le soleil couchant.

Notre vie est une traversée de la terre vers le ciel au long de laquelle nous essuyons de violentes tempêtes.

 

L’abandon de l’Indochine fut une secousse terrible.

 

Le Crabe-Tambour en revint, seul, à bord d’une jonque. Pierre Guillaume cherchait encore, comme un retour aux sources, un dépouillement total. Ce dépouillement que connaît le navigateur solitaire et l’ermite au fond du désert.

 

« Il est toujours bon pour ne pas vieillir de se retremper dans l’esprit de ses origines. Car notre esprit est un esprit de croisade ou bien nous n’y sommes plus », disait le Père Sevin, le fondateur des Scouts de France.

 

Un peuple qui perd la mémoire risque de mourir de froid car, comme disait Soljenitsyne, « nous portons la mémoire sur notre dos ».

 

Les marins, eux, la portent sur leur bateau, cette mémoire. Gravée par nos larmes et par nos sacrifices, gravée par notre fidélité et notre espérance, gravée en lettres de sang par ceux qui sont tombés pour Dieu, pour l’Eglise et pour la Patrie...

Gravée par nos prières.

 

La foi est aussi profonde que la quille d’un navire.

 

Pierre Guillaume naît de la race des corsaires malouins. Il prononce sa promesse scoute en février 1938. Il a treize ans alors. Scout routier, il est présent au jamboree de Moisson en 1947. Comme Guy de Larigaudie il pourra dire : « J’ai mené l’aventure d’un bout à l’autre des cinq continents et j’ai réalisé les uns après les autres tous les rêves de mon enfance. »

 

Pierre Guillaume restera profondément marqué par les catholiques du Tonkin.

 

Il disait : « Qui se souvient de ces curés vietnamiens qui pleuraient en embrassant le pavillon français à l’arrière de nos bateaux ? Qui se souvient de ces jonques, de ces sampans, de ces radeaux de bambou portant des familles entières qui chantaient des cantiques ?

 

Ils voguaient, à demi immergés, vers la terre promise symbolisée par le pavillon français... Qui se souvient de toutes ces églises arborant le pavillon du pape ?

J’ai vu des réfugiés chanter les matines sur des bateaux, en actions de grâce. J’ai vu des femmes mettre un enfant au monde sur un radeau de bambou... »

 

Chaque paroisse avait sa bannière.

 

C’était cela la chrétienté !

 

Chaque transport fut un miracle.

 

Prévue pour quatre-vingts à cent marins, la Marie-José arrive à Haïphong avec sept cents chrétiens... le bateau gîte mais il tient.

 

Plus de sept cent mille chrétiens seront sauvés par la Royale.

 

A lui seul, il sauvera plus de 25 000 réfugiés

 

On se souvient du raid du Crabe-Tambour. Il remonte jusqu’à la cathédrale de Phat Diem. A lui seul il sauvera plus de vingt-cinq mille réfugiés. Il ne reçut pas la médaille de saint Grégoire le Grand, décoration du Saint-Siège, qu’il avait pourtant méritée. Le nonce apostolique en fut très déçu.

 

Il rentrait maintenant.

Il faisait voile dans l’océan Indien.

Il rentrait du royaume khmer.

Et il devait y avoir le coeur lourd.

 

Il regardait l’horizon comme Psichari qui y voyait les saints, les martyrs et toute la cour céleste.

 

« Duc in altum, avance au large » disait le Christ.

 

Après son aventure en Somalie, Pierre Guillaume apprend la mort au combat de son frère Jean-Marie.

 

Il revendique alors l’honneur de remplacer ce frère. Geste magnifique. Geste de chevalier.

 

« Il n’y a pas de plus grande preuve d’amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ! »

 

Cet acte d’amour pour son frère, c’est aussi un acte d’amour pour la France.

L’honneur de servir.

 

Et puis c’est l’abandon de l’Algérie.

Je me souviens... A Alger, j’avais quatorze ans... le massacre des harkis... la valise ou le cercueil.

 

Le commandant Guillaume choisit le respect de la parole donnée.

 

« Nous sommes la jeunesse de Dieu, la jeunesse de la fidélité », disait l’officier de marine François Athanase de Charette.

 

Une parole donnée ne se reprend pas sinon on est parjure.

 

Pierre Guillaume connaît alors les procès et la prison. Il a tout perdu.

 

Fors l’honneur !

 

Quand on lui demande pourquoi il prend de telles positions il présente son sabre à deux mains et il répond :

 

« Et la foi, monsieur le président ? »

Car c’est là l’éternel combat.

De Satan contre le Christ.
De la barbarie contre la civilisation.
De la violence contre le droit.
Du mondialisme contre la patrie.
De la subversion contre le pays réel.

 

Et dans ce combat le commandant Guillaume tint sa place partout. Aux côtés des Karen, des Mhongs, des Vietnamiens, des harkis, des Français d’Algérie.

 

Avec une énergie incroyable, invincible.

 

Combien de missions il a menées en Afrique et en Asie !

 

Sa grandeur d’âme faisait chaud au coeur.

 

Souvenez-vous de sa joie de vivre, de son enthousiasme, de sa bonté, de son humour.

 

C’est ainsi que nous le vîmes à Riaumont, petit village qui résiste.

 

Il vint inaugurer, devant cinq mille personnes, les feux de la Saint-Jean « contre vents et marées, saint Michel rempart de la chrétienté ».

 

Il vint aussi, devant la basilique Notre-Dame-de-Lorette où repose le soldat inconnu d’Indochine et d’Algérie, remettre le drapeau des scouts français anciens combattants.

 

Il fut un fidèle du Cercle national des combattants.

 

En ces temps où toutes les valeurs fondamentales sont remises en question il disait : « Je crois à un sursaut de la France avant la mort. »

 

Nous l’avons tous entendu sur Radio-Courtoisie porter haut les couleurs de la France et de la Royale. Pierre Guillaume avait une foi d’enfant, cette foi qui traverse les tempêtes et s’émerveille devant une bougie.

 

Une lumière n’est pas faite pour être mise sous un tonneau mais sur un chandelier pour qu’elle éclaire tous ceux qui sont dans le navire. Et cette petite barque, il ne faut jamais l’oublier, c’est la barque de l’Eglise avec ses saints et martyrs, ses confesseurs de la foi et ses vierges. Elle s’appelle Le Lépante ou La Jeanne d’Arc...

 

Avec le Christ, avec l’Eglise notre mère, nous passons au milieu des épreuves et des douleurs les plus profondes.

 

Pour le commandant et son épouse, la perte de deux enfants, la disparition de tant de compagnons et frères d’armes... toutes ces souffrances ne peuvent s’illuminer que par la Passion et Résurrection du Christ.

 

« Le péché contre l’espérance est le plus mortel de tous », dit Bernanos.

 

Le commandant a transmis le flambeau, nous gardons l’espérance !

 

Le poème de Jean de Brem à Jean Marie Bastien-Thiry ne se termine-t-il pas par ces mots de victoire :

 

Merci pour tout, mon colonel :
D’avoir vécu en Français
Et d’être mort en officier.
Car le moment est venu
Où après un tel exemple
Tu vas nous obliger à vaincre.

"Ce vieux coeur de soldat n’a point connu la haine"

 

Notre vie a des hauts et des bas. Le Seigneur nous connaît bien. Si nous avons péché, il faut demander pardon au Christ de miséricorde.

 

Sainte Faustine a vu deux rayons sortir du Sacré Coeur, l’un, d’argent, représente le baptême et la purification, l’autre, couleur de sang, représente l’Eucharistie.

 

Il faut se laisser toucher par ces deux rayons.

 

Il faut se laisser transpercer par la Grâce.

 

Que ceux qui se disent agnostiques se fassent enfants. Ils seront touchés par la Grâce.

 

Sans contrition et sans pardon, il n’y a pas de purification.

 

Nous sommes tous un peu comme les compagnons d’Emmaüs. Nous ne voyons pas que le Christ marche avec nous.

 

Saint Jean Baptiste, l’éclaireur de pointe, le disait : « Il y a quelqu’un parmi vous que vous ne connaissez pas. »

 

Le soleil se couche, la mer est sûrement très belle.

 

« Celui qui vit en moi, même s’il meurt vivra. Et quiconque croit en moi aura la vie éternelle. »

 

Le dernier combat, le Crabe-Tambour le mena contre la maladie. Tous, nous avons admiré son courage.

 

Lorsque je l’ai vu, il ressemblait à un prisonnier des camps vietminhs. C’était le soir. Commandant, vos yeux se sont ouverts, vous m’avez reconnu. Vous avez reconnu Celui qui m’a envoyé. Celui qui veille dans la barque et qui apaise la tempête.

 

Vous avez reçu l’absolution et les sacrements extrêmes.

 

Les onctions d’huile.

 

Sur les yeux car nous péchons par le regard.
Sur les oreilles car nous écoutons de mauvaises choses.
Sur la bouche car nous avons de mauvaises paroles.
Sur les mains car nous péchons avec les mains.
Sur les pieds car nous marchons sur de mauvais chemins.

Chaque onction est un pardon demandé.

 

Vous avez reçu la communion.

 

Et la bénédiction apostolique au nom du pape Jean Paul II.

 

J’ai senti votre coeur brûlant.

 

Alors vous m’avez salué de façon réglementaire et j’ai répondu à votre salut au nom de tous vos amis...

Seigneur vous l’avez endormi
Dans une paix certaine
Entre les bras de l’espérance et de l’amour
Ce vieux coeur de soldat n’a point connu la haine.

Pour la France et pour vous il a combattu avec beaucoup d’amour.

Que Notre Dame d’Afrique,
Que Notre Dame d’Indochine,
Que Notre Dame de la Mer,
Vous accueille, Commandant, avec Sainte Anne.

Et qu’Elle étende son blanc manteau sur la France.

A genoux les enfants ;
A genoux les hommes ;
Et debout la France !

 

Père Jean Paul Argouarc’h

 

 

Le Commandant et NAI SHWE KYIN

 

   

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